LES TISSUS
Sur un jeu de petit temps avec un tissu trop raide, le creux de la voile ne passera pas lors des virements de bord. Avec un tissu trop mou, le creux reculera à chaque survente.
La position et la valeur du creux lors de la coupe de la voile dépendra du tissu utilisé. On a intérêt à avancer légèrement le creux et à ne pas trop l’accentuer avec un tissu léger. Une voile en tissu lourd se déformera moins, la forme en statique doit être très proche de celle désirée sur le plan d’eau. Sur les jeux de brise un tissu le plus bloqué possible sera utilisé.
Il ne faut pas oublier que nos gréements sont extrêmement élancés, ce qui rend les problèmes de déformation des tissus importants et très proche de ceux rencontrés dans la voile grandeur. Un millimètre d’allongement sur une chute de grand voile de petit temps, donne environ un centimètre de vrillage non contrôlé. 0,5% d’allongement égale un centimètre de vrillage.
LES DIFFERENTS TYPES DE TISSUS
A l’exception du mono film et du calque, une toile est constituée d’un assemblage croisé de fils longitudinaux (la chaîne), et de fils transversaux (la trame).
Les qualités recherchées sont la stabilité de forme, le meilleur rapport qualité mécanique / poids, une porosité réduite, une surface lisse et un taux d’absorption d’eau minimum.
Papier calque polyester
Il se trouve dans toutes les bonnes papeteries. De 50 à 120 microns d’épaisseur (70 microns est le plus utilisé pour les jeux A). Résistant, facile d’emploi, faible allongement mais très sensible à l’humidité. Son faible prix permet de faire beaucoup de voiles.
Nylon
Il se trouve en voilerie ou dans les boutiques de cerfs-volants (ex : toile à spi). A éviter, car beaucoup trop élastique.
Dacron
Il se trouve en voilerie (ex : voilier de croisière). Toile polyester d’une élasticité modérée qui la rend plus facile à s’adapter et à se régler sur le gréement. Poids élevé, se déformant dans le temps, gardant l’humidité.
Mono film
Il se trouve en voilerie (ex : Voile de planche à voile). C’est un film mylar transparent léger, stable, qui n’absorbe pas l’eau et facile à employer, mais il est peu résistant au choc. De plus en plus utilisé en VRC sous des différents grammages. Il est malheureusement transparent.
Mylar
Il se trouve en voilerie (ex: Voilier de compétition). Tissu composite : association d’un film mylar avec un tissu croisé de fibre polyester. Légèreté, stabilité, faible allongement, résistance, n’absorbe pas l’eau et facile à employer.
Kevlar
Il se trouve en voilerie. Association d’un film mylar avec un tissu croisé de fibre kevlar. Toutes les qualités du tissu précédent avec une déformation quasi nulle.
Plus les caractéristiques des tissus sont bonnes, et plus le grammage (grs/M2) peut être faible.
Exemple pour des jeux de voiles en mylar :
Pétole | petit temps | brise | grosse brise |
50 grs | 70 grs | 100 grs | 120 grs – 150 grs |
IMPORTANT : lors de l’achat d’un tissu, vérifier s’il n’a pas trop de « mémoire ». En général le tissu s’enroule dans la position de stockage initial (la « mémoire »). Acheter du calque en feuille et non en rouleaux. Ne pas acheter des tissus non équilibrés (une face lisse et une face rugueuse).
LE MATERIEL
- Une grande table ou planche de 220 x 70 centimètres.
- Une grande règle droite de deux mètres, une équerre, crayon, stylo, cutter, ciseaux…
- Pour l’assemblage des panneaux, un rouleau d’adhésif double face de 5 ou 6 mm de large qui se trouve dans certaines papeteries (à TOULOUSE, La boomborée cerf-volant).
- Une machine à coudre avec du fil 100% polyester, de l’huile fine.
- Pour les angles de la voile, du tissu à voile épais ou du tissu autocollant ou de l’adhésif armé. De la corde à piano ou des œillets.
LA DECOUPE DES LAIZES
Faire un dessin précis de la voile à l’échelle 1.
Préparer des bandes de tissu dont la largeur sera égale à la hauteur d’une laize plus un centimètre (pour les jeux A avec 5 panneaux dans la GV, les panneaux font 43 cm de haut).
Découper les panneaux en partant du bas de la voile en laissant 2 centimètres de plus de chaque côté en largueur.
Les jonctions entre les panneaux sont toujours positionnées perpendiculairement à la chute de la voile pour que la chaîne du tissu travaille bien dans l’axe longitudinal de la voile.
ATTENTION : alterner les faces à chaque panneau pour neutraliser la « mémoire » que le tissu a pris en restant roulé.
L’ASSEMBLAGE DES LAIZES
Les panneaux de voile sont coupés, il faut les assembler avec l’adhésif double face en donnant à la voile un certain volume pour qu’elle ressemble à une aile d’avion.
Ce volume est donné en pinçant la voile sur le guindant et la chute. Il en découle un excédent de tissu au milieu de la voile, donc du creux. Ce creux est un élément très important car il détermine l’efficacité de la voile. Nous conseillons aux débutants d’apprendre à assembler leurs voiles pour leur permettre de maîtriser ce paramètre essentiel.
L’assemblage avec la machine à faire les laizes (MAFLL)
Fabrication de la machine
Matériel nécessaire :
- Un panneau d’aggloméré en 19 mm de 600 x 400 millimètres.
- Deux plaques rigides en plastique, en acier ou en alu de un millimètre d’épaisseur sur 600 x 200 millimètres.
- Une baguette en bois, en contreplaqué ou en alu de 3 millimètres d’épaisseur et de 17 mm de haut sur 600 mm de long.
- Des petites pointes ou de la colle forte (mastique silicone).
Râper et poncer la baguette pour obtenir un profil sans le moindre défaut. Ce profil à la forme d’un profil d’une aile d’avion, plat dessous et une courbe régulière dessus.
Cette courbe a son sommet entre 30 et 40% de la longueur du profil. L’expérience a montré qu’il est possible de fabriquer toutes ces voiles avec un profil moyen à 40% (profil « SPI D’OC »). Les résultats sont corrects.
Fixer la baguette dans l’axe du panneau en agglo (comme ceci _______I_______ , le coté plat dessous).
Positionner des plaques en plastique de 200 x 600 mm de chaque coté, une bordure en appui sur la baguette et les trois autres bordures fixées sur l’agglo.
On obtient une forme concave qui va servir à donner le volume à la voile.
Mode d’emploi de la machine
Positionner un panneau bien plaqué sur un coté de la Machine.
Poser l’adhésif double face, sans le tendre, sur le premier panneau.
Avec les deux mains, faire glisser l’autre panneau bien plaqué sur l’autre coté de la MAFLL jusqu’au recouvrement complet de l’adhésif.
Avec le dernier doigt libre tapoter la jonction des deux panneaux pour que l’adhésif colle.
Assurer le collage en appuyant fermement avec l’ongle au niveau de la jonction.
En positionnant les panneaux plus ou moins sur l’avant ou l’arrière de la machine, on obtient un creux plus ou moins prononcé. Si on veut un creux différent, il faut changer de profil.
Cette méthode, une fois bien maîtrisée, permet d’assembler rapidement une voile. Elle permet aussi de reproduire deux fois la même voile, si on a pris soin de prendre des repères et de tout noter sur un carnet.
Valeur du creux donné pour un jeu A avec la MAFLL réalisée avec le profil SPI D’OC.
Le profil SPI D’OC donne des voiles avec un creux maximum constant qui se trouve à environ 40% de la longueur de la corde quel que soit la largeur de la voile et la valeur du creux.
La valeur du creux est donné par l’emplacement choisi sur la MAFLL. Cet emplacement est contrôlé par une graduation tracée sur la MAFLL. Plus la voile sera fabriquée vers l’attaque de la MAFLL et plus elle sera creuse.
La machine est graduée de cm en cm de 0 a 60 en partant de l’attaque.
La GV est réalisée avec 5 panneaux de 43 cm de haut. Le Foc est réalisé avec 4 panneaux de 30 cm de haut.
Les panneaux sont découpés avec 4 cm de tissu supplémentaire en largeur.
Sur chaque panneau, il est tracé un repère à 30% de la largeur (En partant de l’attaque). Ce repère est simplement une valeur pour positionner les panneaux sur la Machine. Ce n’est pas l’emplacement du creux sur la voile. L’emplacement du creux sur la voile est donné par la forme du profil.
Sur le foc :
- La jonction des deux panneaux du haut de la voile se réalise en positionnant les repères sur la graduation 15 de la Machine.
- La jonction des deux panneaux du milieu sur la graduation 17 de la Machine.
- La jonction des deux panneaux du bas sur la graduation 19.
Sur la Grand Voile :
- La jonction des deux panneaux du haut sur la graduation 15 de la Machine.
- La jonction des deux panneaux suivantes sur la graduation 19.
- La jonction des deux panneaux suivantes sur la graduation 23.
- La jonction des deux panneaux du bas sur la graduation 27.
Sur le jeu B, les valeurs sont les mêmes.
Sur les jeux C, je mets autant de creux, mais un panneau de moins dans chaque voile.
Foc: 15 et 17 GV: 15,19 et 23.
Les coutures
Avec un bon adhésif double face, il n’y a pas besoin de couture pour les voiles de petit temps qui ont un état de surface glacé (calque, monofilm).
Pour les autres tissus et les jeux de gros temps, coudre avec du fil polyester, si possible avec le point en zig zag. Coudre les 2 premiers panneaux sitôt assemblés et ainsi de suite pour éviter toute déformation pendant les manipulations.
Faire des essais pour trouver le bon réglage de la machine à coudre.
Pour que le fil ne colle pas à l’aiguille à cause de l’adhésif double face, huiler la bobine de fil.
Ne pas travailler sur une trop petite table, car votre voile risque de se détériorer sur les rebords et les angles de la table.
Mettre la machine par terre où, pour coudre plus facilement, confectionner une grande table de travail dans laquelle il faudra encastrer cette machine.
LE TRACAGE
Tracer le foc
Pour tracer le guindant du foc (avant du foc), positionner une règle sur la voile maintenue avec deux serre-joints; un à chaque extrémité de la voile.
Tracer un premier trait de guindant.
Sans toucher aux serre-joints, relever le point d’écoute de façon à ce que la voile s’enroule dans le sens de la longueur. Tracer un nouveau trait. Normalement le deuxième trait laisse entre 1 à 3 mm de rond de guindant par rapport au premier.
C’est le rattrapage du volume. En levant le foc, on absorbe le creux de la voile.
Couper sur le deuxième trait.
Tracer le reste de la voile en se servant de la jauge décrite dans le fascicule de jauge FFV.
Tracer la grand voile
En principe, le mât d’un gréement classique est droit, et le traçage de la grand voile est identique à celui du foc.
Sur le balestron ou sur tout mât cintré, on ne peut pas tracer correctement le guindant de la grand voile tant que le foc n’est pas monté, et que le cintre du mât n’est pas défini.
Présenter la grand voile sur le mât comme elle doit être en position de navigation en se servant d’épingles à linge pour la maintenir. Tracer le rond de guindant en se servant du mât.
LES RENFORTS
Les renforts ne sont pas à négliger. Les voiles ont un très fort rond de chute toléré par la jauge. Le renfort de point d’écoute doit être rigide et relativement haut. En fait, il sert de cinquième latte pour tenir toute la chute. Les renforts de point d’amure et de point de drisse ne doivent pas être trop importants car ils peuvent modifier la forme de l’attaque de la voile.
Les renforts d’angles
Ils peuvent être en tissus à voile rigide éventuellement autocollant, ou en adhésif très solide (adhésif armé).
Le tissu à voile collé et cousu résistera mieux dans le temps que n’importe quel adhésif.
Le passage des écoutes et des drisses peut se faire :
- au travers d’un œillet (magasin de bricolage),
- derrière un bout de corde à piano fixé dans la voile,
- dans un trou réalisé dans la voile avec une pointe chaude.
Les renforts de guindant
En adhésif armé ou mieux en tissu à voile.
Poser d’abord l’adhésif avant de couper la voile.
Si le tissu est plié pour recouvrir les deux cotés de la voile (très délicat à réaliser), le positionner d’abord avec de l’adhésif double face avant de le coudre.
Les renforts le long de la chute
Ils sont rarement employés, car ils sont très difficiles à poser sans déformer la voile. Ils peuvent être en adhésif mylar ou renforcé kevlar.
Les lattes
Elles sont réglementées par les jauges. Elles peuvent être en plastique rigide, en fils carbone, etc… Elles sont maintenues par du double face ou par un adhésif.
LE MONTAGE DES VOILES
Le montage des voiles sur le gréement est la partie la plus délicate, car elle demande beaucoup de précision et de temps, donc de patience. Tout régatier doit savoir monter et régler ses voiles.
Le montage du foc
Tous les cordages doivent être montés avant de commencer à mettre sous tension le gréement. Ceci pour éviter de détériorer le foc par une tension excessive et non contrôlée.
Le point de drisse
Il est relié au mât par un tendeur trois trous. Ce tendeur servira à mettre sous tension le foc, mais il ne doit jamais être plus tendu que le tendeur de l’étai qui lui, sert à mettre sous tension le gréement.
Le point d’amure
Il relie le foc à la bôme. Il n’y a pas de réglage, c’est un point fixe. Le foc ne doit pas subir de déformation ou de contrainte au point d’amure.
Le point d’écoute
Cette liaison doit être la plus courte possible. Le réglage du creux du foc se fait par coulissement sur la bôme (passe-fils). La tension de la chute de foc ne se règle qu’avec la balancine.
Les fixations sur l’étai
Le foc doit pouvoir glisser librement sur l’étai. Si le foc a un gousset sur toute la longueur du guindant, il ne reste qu’a l’enfiler sur l’étai. Sinon, faire une fixation sur l’étai tous les dix centimètres, soit avec du fil à coudre et une aiguille, soit avec des petits bouts de tubes scotcher sur le guindant.
La mise sous tension du foc
Pour mettre sous tension le foc, il faut mettre sous tension l’ensemble du gréement. En effet la tension de chaque cordage influence le reste du gréement, surtout le cintre du mât. C’est pour cela qu’il est indispensable que le foc soit à sa place pour pouvoir tracer le guindant de la grand voile.
Tendre l’étai et le pataras ensemble, de façon que la moitié inférieure du mât reste droite. Le mât est surtout cintré au-dessus de l’attache de foc.
Attention, il faut aussi jouer sur la balancine pour éviter que la chute du foc n’encaisse toute la tension. La chute du foc ne doit jamais être tendue sous peine d’autodestruction. Le foc va prendre des formes bizarres, mais ce n’est pas grave tant qu’il n’est pas sous tension.
Après quelques minutes de tâtonnement, le mât est à la forme et à la tension souhaitée. On peut alors tendre légèrement le guindant de foc qui va se mettre tout seul à sa place. Si le point d’écoute n’est pas à la bonne hauteur, jouer avec la balancine et l’étai pour le rééquilibrer.
Le montage de la grand voile
Le point de drisse
Il relie la grand voile au mât et à la tige de pataras. Il n’y a pas de réglage, c’est un point fixe. La grand voile ne doit pas subir de déformation ou de contrainte au point de drisse.
Le point d’amure
Il sert à régler la tension du guindant de la grand voile. Le réglage se fait avec un tendeur trois trous.
Le point d’écoute
Il doit être le plus près possible de la bôme. Il sert surtout à régler le creux de la voile mais aussi, avec le pataras, l’ouverture de la chute.
Il est réglable par des passe-fils ou par des tendeurs trois trous.
Les fixations sur le mât
Pour les mâts avec une engoujure, enfiler les bouts de tube qui ont été montés sur la voile (voir guindant de foc).
Pour les mâts ronds, la grand voile est maintenue par un brin ou un anneau environ tous les 20 centimètres. La grand voile ne doit pas être trop serré contre le mât pour qu’elle puisse passer librement d’un coté à l’autre.
La mise sous tension de la grand voile
Monter la grand voile et ajuster le guindant de la voile à celui du mât en jouant sur :
- la tension du pataras (contrôle le cintre du haut du mât),
- le réglage de la cale d’étambrai si le gréement en est équipé (bas du mât),
- la tension des haubans, s’ils influencent le cintre du mât,
- et la tension de l’étai (contrôle le cintre du bas du mât).
- ATTENTION : modifier la tension de l’étai va modifier complètement le réglage du foc.
LES FORMES ET LES REGLAGES
Il est difficile de traiter des voiles sans parler du gréement tant ils doivent être en harmonie pour être performant.
Comme toutes les parties du bateau, les voiles ne sont qu’un compromis de vérités contradictoires. Un savant mélange que chacun dose à sa façon pour obtenir les meilleures performances en fonction de son style de pilotage, du plan d’eau, des conditions météo, du bateau et de ses convictions.
Chacun des ingrédients est en contradiction avec le suivant et un gréement se met au point comme un moteur de formule 1 : du couple (relance après un virement de bord) au détriment de la vitesse de pointe (cap une fois le bateau lancé) ou de la vitesse de pointe au détriment des accélérations.
Chaque paramètre modifié dans les réglages d’un gréement, entraîne la modification de tous les autres réglages. Un gréement est un château de cartes qui tient debout et propulse le bateau, en supprimant une carte, tout s’écroule !
Le creux
Une voile creuse fait moins de cap mais plus de vitesse et passe plus facilement dans le clapot. Elle pardonne plus car elle tolèrera une plus grande variation d’angle d’incidence avec le vent. Plus une voile est creuse et plus il est difficile de faire ouvrir la chute.
Une voile plate est moins puissante mais permet de faire plus de cap. Il faut être un barreur confirmé et précis, la moindre erreur et on « plante » le bateau. Les filets d’air décrochent du profil de la voile.
Plus le creux est avancé (30%) et plus la voile relance vite après un virement de bord, mais on perd en vitesse de pointe et en cap.
Le creux d’une voile est donné soit par des pinces, soit par du rond de guindant.
Les pinces
Elles permettent non seulement de donner du creux à la voile mais surtout de le positionner exactement là où on le souhaite (30%, 40%, en bas ou en haut de la voile). Elles sont ce qu’il y a de plus efficace pour donner du creux mais évidemment ce qu’il y a de plus délicat à réaliser. (voir 5.5 assemblages des laizes).
Le rond de guindant
Le creux créé avec le rond de guindant est très efficace pour l’attaque d’un foc. Mais le creux est plus baladeur qu’avec des pinces, il a tendance à reculer rapidement avec le vent et il est donc nettement moins contrôlable.
Pour la grand voile, le rond de guindant doit être en harmonie avec le cintre du mât. Le mariage mât / voile est déterminé par la valeur du cintre du mât par rapport à la valeur du rond de guindant de la voile.
Un mât trop cintré par rapport à sa grand voile aura tendance à aplatir l’attaque de la voile, reculer le creux et dans l’extrême, créer des plis entre chaque anneau de la grand voile et le point d’écoute. La chute de la grand voile aura tendance à « casser » et à basculer sous le vent.
A l’inverse, un mât trop peu cintré fera apparaître un creux très avancé, le guindant de la voile aura tendance à passer sous et devant le mât et se transformera en creux dès que le vent forcera.
Le problème se complique du fait que le cintre du mât n’est pas régulier. Le mât est en général un peu cintré en bas et plus cintré vers le haut. Une belle voile ayant en principe, peu de rond en bas et plus vers le haut. En fait, une belle voile est un compromis entre du creux donné par des pinces (volume général et positionnement de ce creux) et du creux donné par du rond de guindant (attaque de voile plus ronde).
Le réglage des guindants
Les guindants doivent être tendus juste pour supprimer les plis.
On barre au près à la limite du faseyement, de la même façon, on règle un guindant à la limite des plis. Il vaut mieux, et de loin, un guindant trop peu tendu à un guindant trop tendu.
La seule excuse a un guindant trop étarqué est une voile mal coupée. En estimant le creux de la voile trop reculé et en tendant fort le guindant, ce creux avancera et pourra ainsi compenser partiellement une mauvaise coupe de voile. Sur un foc, on peut ainsi creuser l’attaque. Dans ce cas ne jamais oublier de les détendre une fois la régate terminée sous peine de retrouver les voiles défoncées quelques jours plus tard.
Une voile a un certain creux donné par celui qui l’a conçue. Lors du réglage, il faut essayer de se rapprocher le plus possible de ce creux et ne surtout pas essayer de le forcer.
Une voile trop plate peut, à la rigueur, être légèrement creusée mais c’est une erreur d’essayer d’aplatir une voile trop creuse. On arrivera qu’à la contraindre et à lui ôter toute efficacité. La seule solution est de la faire vriller plus que la normale.
Le vrillage des chutes
C’est le réglage le plus important sur le gréement.
Des chutes fermées donnent un bon cap au près mais les relances sont plus délicates après un virement de bord. Evidemment, les chutes ouvertes donnent l’effet inverse.
On réglera les chutes ouvertes partout ou la relance est primordiale :
- sur des petits parcours où il faudra pouvoir virer de bord souvent,
- sur les plans d’eau agités,
- dans les petits airs où chaque risée doit se transformer en une accélération,
- quand un « combat des chefs » s’annonce et qu’il faudra sévèrement contrôler un ou plusieurs adversaires (mais néanmoins amis!).
A l’inverse on pourra tendre les chutes quand on a besoin avant tout de vitesse de pointe :
- des grands bords de près,
- mer très plate,
- si l’on se sent très fin barreur (attention à l’excès de confiance en soit).
Les vrillages du foc et de la grand-voile doivent également être en harmonie. Le vrillage du foc doit être calqué sur le creux maximum de la grand-voile. Les voiles bordées, le bateau légèrement gîté sur son ber, en regardant de derrière le bateau, la chute du foc doit avoir le même arrondi que le creux de la grand-voile. Le vrillage du foc se contrôle avec la balancine.
Réglage de base du vrillage des voiles d’un classe M :
- 5 cm de vrillage sur la grand-voile situé au tiers supérieur de la voile,
- 3 cm de vrillage sur le foc situé au tiers supérieur.
Le foc fait office de volet permettant d’accélérer les filets d’air sur l’extrados de la grand voile (partie sous le vent de la voile). Ce phénomène a pour effet d’augmenter l’efficacité de la grand voile mais également de corriger les erreurs de barre. Même si le cap n’est pas idéal, la grand-voile travaille quand même efficacement puisque les filets d’air sont artificiellement recollés.
Une autre possibilité très intéressante d’agir sur le vrillage de la grand-voile est le cintre naturel de la tête de mât dans les surventes. A chaque risée, la tête de mât déverse sous le vent et fait ouvrir la chute de la grand-voile, ce qui soulage le bateau et le fait accélérer. C’est un phénomène important et bien venu dont on n’estime pas toujours l’importance.
- des barres de flèche trop tendues, le mât ne déverse plus dans la « claque » et le bateau se vautre et devient ardent,
- à l’inverse, si le mât cintre trop rapidement, la voile se met trop facilement « en drapeau » et le bateau ne fait plus de cap.
La tension des haubans est un réglage essentiel pour les performances d’un gréement haubané.
Les bômes doivent être extrêmement rigides car en cintrant, elles relâchent le pataras, le mât se redresse et n’est plus adapté au rond de guindant de la grand-voile. Une poche se formera sur celle-ci le long du mât.
Un mât très cintré dans le haut donne un étai tendu :
- il évite que le foc ne se creuse sur le guindant, d’où un gain de cap,
- du fait du foc bômé, il tend du même coup la balancine et évite un vrillage non contrôlé du foc, d’ou encore du cap.
L’ouverture des bômes
C’est l’angle des bômes :
- par rapport à l’axe du bateau,
- l’une par rapport à l’autre.
Le treuil étant enroulé au maximum manche et trim bordés sur l’émetteur, mettre la bôme de grand-voile dans l’axe, mais sans que le treuil force. La bôme de foc, doit être débordée d’environ 3 à 4 centimètres par rapport à l’axe du bateau ou l’axe du balestron.
Lorsque l’on navigue au près, on relâche d’un ou deux crans le trim pour trouver le bon compromis cap / vitesse.
Processus de réglage
Par ordre chronologique :
- Tendre l’étai et le pataras pour avoir une tension suffisante sur le gréement.
- Vérifier que le cintre du mât correspond à celui de la grand-voile.
- Régler l’ouverture de la chute de grand-voile.
- Régler l’ouverture de la bôme de grand-voile par rapport à l’axe du bateau.
- Régler l’ouverture de la bôme du foc par rapport à la grand-voile.
- Régler avec la balancine, l’ouverture de la chute du foc.
- Régler de nouveau la chute de grand-voile qui a été modifiée en réglant le foc.
Tout revoir en améliorant la finesse de réglage.